Gaijin Café #15 - Tabehoudai et nomihoudai, le tout à volonté japonais: pratique ou rentable ?
Les tabehoudai(食べ放題) et les nomihoudai(飲み放題) sont des concepts très ancrés dans la culture japonaise. "Manger à volonté" pour le premier, et "boire à volonté" pour le second sont proposés dans une grande majorité de restaurants et souvent ensemble. Les izakaya entre autres proposent presque tous une série de plats accompagnés d'un nomihoudai. Puisque oui, le nomihoudai comprend de l'alcool, chose impensable en France puisque la loi l'interdit.
Non seulement répandues, la plupart du temps ces offres sont peu onéreuses pour le service fourni: environ 3.500 yens (25 euros) pour les entrées de gamme, un tarif qui vous permet donc de manger à votre faim et de boire tout votre soûl durant environ 2 heures voire 3 selon les endroits. Alors bien sûr, à ce prix-là vous ne mettrez pas du wagyû sur votre grill et vous ne boirez pas du Yamazaki 18 ans d'âge mais la qualité est souvent loin d'être mauvaise ou en tout cas bien meilleure que ce que vous pouvez trouver dans les buffets à volonté en France.
Pour ceux qui n'ont jamais fréquenté ce genre d'endroit, on est bien loin d'une orgie de nourriture et d'alcool ou les clients ressortiraient en roulant sur le sol. Même si les japonais ont tendance à manger beaucoup plus dans ce genre de restaurants qu'ils ne le feraient d'ordinaire, la consommation d'alcool est quant à elle souvent raisonnable mais jamais impressionnante (sauf si clairement l'endroit vous vend la cuite de votre vie, près d'une université par exemple). L'avantage de ce genre de formule est avant tout sa praticité: pas besoin de calculer la part de chacun pour le paiement, de surveiller les prix de ses plats pour ne pas exploser son budget ou tout simplement de ne pas se soucier des goûts culinaires de chacun.
Les nomikai par exemple, réunions faussement informelles entre collègues, recourent souvent à des restaurants de ce type qui leur permettent à la fois d'accueillir assez de personnes dans des salles closes mais aussi de les réunir autour d'un repas où chacun peut picorer dans les plats et boire ce qui lui plaît. Les types de restaurants ne sont pas non plus limités: yakiniku (barbecue coréen), shabu-shabu, izakaya, pâtes et pizzas et même cuisine traditionnelle japonaise dans son ensemble. Loin d'une image fast-food ou repas de bas étage, les tabehoudai et nomihoudai figurent parmi les restaurants prisés des japonais comme des gaijin, mais pour des raisons complètement différentes.
Car jusqu'ici, vous pouvez vous poser une question légitime: pourquoi parle-t-on de cela dans le Gaijin Cafe ? La réponse est bien liée à la culture: notre interprétation de la chose est souvent diamétralement opposée.
On l'a précédemment évoqué, c'est souvent la caractéristique "pratique" qui attire d'abord les Japonais et un rapide coup d’œil au prix suffit à les décider si oui ou non ils choisiront tel tabehoudai ou tel nomihoudai.
Alors que de notre côté, nous allons souvent jeter un coup d’œil au menu, aux prix des plats ou des boissons afin de faire un rapide calcul et voir si il remplit notre condition: être "rentable". Vu d'ici, ça fait radin, il est vrai. Mais soyons honnêtes, c'est souvent comme ça que ça fonctionne. Loin de nous l'idée de caricaturer, mais beaucoup d'entre nous ne rentreraient jamais volontairement dans un restaurant où ils payeraient plus que ce qu'ils seraient capables de manger. Et force est de constater que souvent le nomihoudai est rentable à partir de deux bières soit une consommation raisonnable pour nous. Quant au tabehoudai il nous permet de passer la carte en revue sans pour autant payer le prix fort.
En effet, une autre question sensée pourrait-être: mais comment ces restaurants ne font-ils pas faillite ?
Les restaurants de type "à volonté" en France utilisent souvent des techniques pour tenter de calmer nos estomacs sans fond: sushis constitués à 90% de riz, plats trop gras, limitation de nombre de plats totaux... On rigole souvent sur le fait que l'on va ruiner le restaurant en question, et que ce restaurant va tout faire pour nous mettre des bâtons dans les roues. Or les systèmes japonais sont souvent réellement illimités (même s'il vous reste des choses sur la table, une deuxième salve est possible), les restes sur la table sont très rarement facturés, il arrive que le nombre de plats ou de verres par commande soit limité mais ce n'est pas vraiment fréquent, et le service est souvent aussi correct et agréable qu'ailleurs. Par dessus tout, on vient vous prévenir lorsque vient le temps du "last order" et vous pouvez passez votre dernière commande sans stress.
Concept impensable sinon compliqué à mettre en place en France pour bien des raisons dont beaucoup de culturelles. Il faut également avouer que les japonais sont globalement plus petits et moins épais que nous et mangent en conséquence moins. Concernant l'alcool, la rougeur des personnes d'origine asiatique dès qu'ils boivent un verre est un fait assez connu qui serait un symptôme lié à leur faible tolérance à l'alcool, par rapport à d'autres origines ethniques. Souvent impressionnés par notre propre consommation, les japonais s'arrêtent quelquefois au premier, souvent au second verre et donc sous le seuil de rentabilité...
Les restaurants tabehoudai et nomihoudai sont d'ailleurs souvent théâtre de nombreux gaijin smash: en êtres très sociaux, nous aimons discuter et prendre notre temps en mangeant. Et après la dernière commande, il arrive que bien dans notre discussion nous restions à table bien au-delà de l'heure de fin...Et ce n'est pas japonais du tout. Les tablées autour de la notre plient bagage à l'heure pile voire quelquefois avant, et dans l'ordre et le silence.
Une façon de concevoir les choses aux antipodes donc mais qui ne nous a jamais empêchés de passer de bons moments ensemble. Alors pour vous, le tout à volonté: pratique ou rentable ?
L'abus d'alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération.Édito
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